« Mémoire de l’événement »

9h : Projection de El Año del Descubrimiento (Suisse, Espagne, 2019, 200 minutes) 
Grand prix du festival Filmer le travail 2021

Résumé du film
À Carthagène, au sud-est de l’Espagne, voisins, jeunes et chômeurs discutent à l’intérieur d’un bar au milieu des cigarettes, des déjeuners et des apéritifs. Ils se souviennent de rêves insolites, partagent leurs inquiétudes professionnelles ou se projettent dans leur futur. À mesure que la journée avance, on entend de plus en plus les émeutes de la crise industrielle de 1992.

Cette année-là avaient lieu les Jeux Olympiques de Barcelone et l’Exposition universelle de Séville qui célébrait également le cinquième centenaire de la découverte de l’Amérique. Le pays se présentait face à la communauté internationale comme un pays développé, moderne et dynamique. Au même moment, à Carthagène, les protestations contre la crise deviennent de plus en plus violentes jusqu’à terminer en révolte massive qui débouche sur l’incendie du parlement régional de Murcie.

Né à Murcie en 1981, Luis López Carrasco est réalisateur et écrivain. En 2008, il a cofondé Los Hijos, un collectif expérimental de films et de documentaires. Ses œuvres ont été projetées à l’occasion de nombreux festivals de cinémas internationaux. « Los materiales », le premier long métrage réalisé par Los Hijos, a été primé au BAFICI 2014, à Lima Independiente 2014, à l’Uruguay Winter Festival 2014, ainsi qu’à l’IBAFF 2014. Son dernier court métrage, « Aliens », a été primé au Dokufest (Kosovo), au Fidocs, au Cinespagna de Toulouse et au FICA 2017.

Commentaire
Le 3 février 1992 à Carthagène (Espagne), après des semaines de mobilisation contre la destruction programmée des industries locales, des affrontements entre les manifestants et les forces de l’ordre débouchent sur l’incendie du Parlement de la Communauté autonome. Cet événement, annoncé dès le début de El Año del Descubrimiento, constitue le point d’ancrage de discussions filmées de nos jours dans un café. Il y est question de conditions de travail, d’addictions, de pollution, du multiculturalisme espagnol, de la période franquiste, etc. Le format vidéo archaïque employé projette des corps du vingt-et-unième siècle dans une époque antérieure, d’autant plus que les récits contemporains sont scandés par des archives de 1992. El Año del Descubrimiento se présente comme une agora où chaque citoyen a voix au chapitre, et où des points de vue contradictoires peuvent coexister. Ainsi, l’affirmation que « les jeunes d’aujourd’hui ne connaissent rien à la politique » est reçue avec distance lorsque l’on vient de constater l’inverse. Il n’est pas question de savoir qui a raison et que penser, mais comment faire société à partir des expériences singulières de chacun. L’usage du split-screen témoigne de la complexité d’un tel espace démocratique : la ligne noire qui scinde l’écran a le pouvoir de rapprocher deux visages distants, de les mettre sur le même plan, mais le lieu qu’elle génère ainsi est paradoxal et purement cinématographique. À défaut de pouvoir le transposer dans le monde réel, le film formule à travers la rencontre de générations et de perspectives un manifeste contre un court-termisme délétère. (Olivia Cooper Hadjian, membre du comité de sélection de Cinéma du réel, critique pour Critikat)

12h30 : Discussion avec Amélie Bussy (UBM, Artes), Maïté Peltier (directrice artistique et déléguée générale du Festival Filmer le travail), Clément Puget (UBM, Artes), Marguerite Vappereau (UBM, Artes).
 

Événement dans le cadre de l’axe « Art et événement » du laboratoire Artes.

Projection en partenariat avec le festival Filmer le travail de Poitiers.